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Les enjeux de la sécurité (ou des sécurités) pour les entreprises
La sécurité est un sujet capital dans le secteur de l’énergie, mais pas seulement. Elle est devenue un enjeu majeur pour l’ensemble des entreprises. Éclairage avec Nicolas Toledo, responsable Facteurs humains et organisationnels de la sécurité à l’Isci (Institut pour une culture de sécurité industrielle).
Bio express
Nicolas Toledo est diplômé de l’Executive Mastère spécialisé Manager des Organisations. Il a été officier de police judiciaire, directeur d’enquêtes sur des événements accidentels et/ou criminels majeurs. Il est spécialisé dans les FHO (Facteurs humains et organisationnels) et participe, aux côtés de l’équipe expertise et accompagnement de l’Icsi, à des formations et des diagnostics Culture de sécurité.
Pourquoi la sécurité, au sens large, est-elle devenue plus que jamais un enjeu majeur pour les entreprises ? Est-ce lié à un contexte global de défiance ?
Nicolas Toledo – Les sujets liés à la sécurité et à la maîtrise des risques n’ont cessé de prendre de l’importance car ils touchent directement à la pérennité d’une entreprise. Un accident peut avoir un impact potentiel sur l’environnement, les populations, un territoire… Sans parler du métier, du nom de l’entreprise concernée et de son activité.
Dans une société ultramédiatisée, le moindre incident prend une résonance interne et externe encore plus grande. La complexité technique, les enjeux sociaux et sociétaux, les impératifs de développement, les défis des territoires sont aujourd’hui sans doute plus prégnants. Cela induit une nécessaire appropriation d’une démarche globale : les progrès en matière de sécurité(s) peuvent émerger de tous les acteurs d’une entreprise, pour lesquels acquérir et développer une culture de sécurité est une priorité.
La sécurité, au sens large, c’est aussi le moyen d’apprendre sur son organisation, par le biais d’un axe qui fait consensus.
À ce propos, que recouvre la notion de culture de sécurité ? Qu’implique-t-elle et qui concerne-t-elle dans une entreprise ?
N. T. – La culture est un ensemble de manières de faire et de penser, partagé par un groupe de personnes. À ce titre, les entreprises développent leur propre culture, ce que l’on appelle la culture organisationnelle. Il ne s’agit plus d’en faire une « bulle » séparée des autres enjeux de l’entreprise. Au contraire.
La sécurité entre en ligne de compte dans les arbitrages effectués par l’organisation ; la culture organisationnelle influence les comportements et les pratiques. Il faut voir la sécurité comme une passerelle au sein de l’entreprise. Alors, la culture de sécurité se traduit par des comportements adoptés par tous pour en faire une sorte d’ADN.
Quelle est votre perception des trois axes principaux de la sécurité : sécurité des personnes, sécurité industrielle et sûreté/ cybersécurité ? Sont-ils tous au même niveau de maturité ?
N. T. – Il est complexe de poser, comme ça, une évaluation globale. Chacun de ces axes n’a pas le même historique, les mêmes contraintes, etc. C’est d’autant plus vrai sur le sujet de la cybersécurité qui est un axe assez « jeune ». Historiquement, les industriels travaillaient sur la dimension technique de la sécurité, puis ils se sont intéressés à l’aspect managérial. Aujourd’hui, ils ont pris ou prennent conscience qu’il existe d’autres facteurs, certes plus difficiles à travailler mais sources de progrès importants. D’autant que cette approche contribue logiquement à améliorer d’autres pans de l’activité de l’entreprise : la qualité, la productivité, la qualité de vie au travail, etc. Ce qui doit favoriser l’acceptabilité de la thématique dans l’entreprise.
Les industriels comprennent aussi que cela chamboule les paradigmes, suppose un engagement fort, une mobilisation à tous les niveaux. Et qu’il faut accepter d’avoir des résultats sur le long terme, moins dans l’immédiat.
Depuis quand et pourquoi l’Icsi et Teréga ont-ils noué un partenariat ?
N. T. – Nous avons commencé il y a un peu plus de dix ans. Ce qui a motivé ce rapprochement, c’est la volonté de l’entreprise de parvenir à améliorer ses résultats au-delà des méthodes dites « classiques », par des approches alternatives. L’Icsi travaille en envisageant l’activité + la sécurité, pour faire rimer efficience avec pérennité et installer une vraie culture partagée. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas continuer à entretenir les méthodes classiques de sensibilisation à la sécurité. Mais, dans des entreprises comme Teréga, qui ont déjà une forte maturité sur les sujets de sécurité, on peut avoir plus de marges de manœuvre pour mettre en place une véritable culture de sécurité efficiente et concrète. En outre, la relation avec Teréga repose sur une démarche d’accompagnement. Il ne s’agit en aucun cas de se substituer aux acteurs de l’entreprise.
Comment ce partenariat se traduit-il concrètement ?
N. T. – Ce qui est primordial c’est avant tout l’échange, le partage. Il se construit à plusieurs niveaux : une connaissance de la réalité de l’entreprise, ses pratiques, un benchmark, une analyse, une formalisation et une mise à disposition de bonnes pratiques. Teréga participe ainsi activement aux observatoires de l’Icsi, afin de partager ses réussites, mais aussi ses difficultés. Nous mettons en place des groupes de travail dont Teréga fait partie, qui permettent de produire des cahiers de la sécurité industrielle et d’enrichir les connaissances des industriels. De plus, au travers de la Safety Academy, des outils pédagogiques sont développés pour des opérations d’acculturation. Des modules de formation ont démarré chez Teréga, autour des facteurs organisationnels et du leadership en sécurité. Notre priorité est avant tout d’être un catalyseur de la réflexion globale sur la sécurité.
