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L’hydrogène apparaît comme l’une des solutions privilégiées pour répondre aux objectifs européens de réduction des gaz à effet de serre. L’Union Européenne investit d’ailleurs massivement pour développer ce vecteur énergétique. Il est donc essentiel de constituer un réseau européen de l’hydrogène. Jorgo Chatzimarkakis, Chief Executive Officer d’Hydrogen Europe, nous explique ses enjeux.
Jorgo Chatzimarkakis – En juin 2021, la loi européenne sur le climat a fixé un nouvel objectif contraignant de 55 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990. En tant que solution de décarbonation de l’industrie et de la mobilité, de stockage des énergies renouvelables intermittentes et de production d’électricité, l’hydrogène permettra d’atteindre cet objectif tout en renforçant la compétitivité industrielle et économique de l’Union.
Dans le cadre de la crise énergétique actuelle, ces objectifs pourraient être encore renforcés. La Commission européenne (CE) l’a bien compris : le paquet législatif « Fit for 55 », celui sur l’hydrogène et le gaz décarboné, ou plus récemment la communication « REPowerEU » marquent l’aube d’une nouvelle ère de l’hydrogène (H2), qui est en passe de devenir un pilier central du système énergétique européen et de la souveraineté énergétique du continent. La Commission prévoit désormais le développement de 20 millions de tonnes (Mt) d’hydrogène renouvelable, pour moitié produit en Europe et pour moitié importé, ce qui va au-delà des objectifs de la stratégie européenne pour l’hydrogène précédemment publiée.
Pour y parvenir, la CE prévoit un nouveau financement de 200 millions d’euros pour des projets d’hydrogène renouvelable dans le cadre d’Horizon Europe et une approbation accélérée de projets dans le cadre de l’IPCEI (1) Hydrogène. De nouveaux actes juridiques viendront compléter le cadre réglementaire et stimuler la production, la consommation et le développement du marché de l’hydrogène renouvelable et bas-carbone. Les travaux sur les normes techniques relatives à l’hydrogène, en particulier pour la production, les infrastructures et les équipements domestiques, vont aussi s’accélérer. En outre, la mise en place de partenariats pour l’hydrogène vert et le développement d’infrastructures spécifiques pour l’hydrogène permettront d’encourager la production et le commerce d’hydrogène renouvelable à l’échelle européenne et mondiale.
J. C. – Aujourd’hui, l’utilisation de l’hydrogène est largement captive et privée. Il existe encore des obstacles au développement d’infrastructures H2 rentables, notamment transfrontalières, et d’un marché de l’hydrogène compétitif, conditions préalables à l’adoption à grande échelle de l’hydrogène. Mais ces obstacles sont en train d’être gommés, notamment avec le paquet législatif Hydrogène et gaz décarbonés, qui réforme le cadre gazier en l’adaptant aux gaz renouvelables et bas-carbone, et pose le cadre de l’émergence d’un marché européen de l’hydrogène ouvert et concurrentiel. Les enjeux géopolitiques actuels ont conduit la CE à compléter ces dispositions au regard de l’urgence énergétique, notamment par les mesures très favorables du plan « REPowerEU » et de son Accélérateur hydrogène.
J. C. – Avec plus de 400 membres – entreprises et associations – couvrant une vingtaine de régions européennes, Hydrogen Europe fédère l’ensemble de la chaîne de valeur de l’écosystème européen de l’hydrogène et des piles à combustible. Nous sommes fiers d’être très engagés dans l’Alliance européenne pour l’hydrogène propre (ECHA), dont le rôle est de créer une réserve de projets d’investissement à grande échelle dans le domaine de l’hydrogène propre. Notre objectif est de favoriser le dialogue et la coopération avec l’ensemble des parties prenantes, industriels, décideurs politiques et société civile. Ce n’est qu’en échangeant, tous ensemble, que nous pourrons développer une infrastructure hydrogène, au profit de l’UE et de ses citoyens.
J. C. – Il existe plusieurs façons d’intégrer l’hydrogène dans les réseaux gaziers, par injection et mélange avec le gaz naturel, par la reconversion de gazoducs existants à l’H2, par la construction d’une infrastructure dédiée à l’H2 et enfin par la méthanation. Ces modèles sont complémentaires et dépendent de la technologie de production, de la zone concernée et de la temporalité des projets.
À la suite de la communication « REPowerEU », l’initiative de la Dorsale européenne pour l’hydrogène (European H2 Backbone, EHB) a accéléré sa vision du futur réseau hydrogène européen : d’ici à 2030, 5 corridors paneuropéens d’approvisionnement et d’importation d’H2 pourraient voir le jour, reliant pôles industriels, ports et vallées de l’hydrogène aux régions à forte demande – jetant les bases de l’approvisionnement futur en hydrogène à grande échelle. À l’horizon 2040, le réseau s’étendrait sur 53 000 km de canalisations, couvrant 28 pays européens. Il serait constitué de près de 60 % de canalisations gazières reconverties et d’environ 40 % de nouvelles, dédiées à l’H2. Transporter de l’hydrogène sur 1 000 km par la Dorsale coûterait en moyenne de 0,11 à 0,21 €/kg d’H2, faisant de cette modalité l’option avec le meilleur rapport qualité-prix pour le transporter à grande échelle et sur de longues distances. Teréga est l’un des co-initiateurs du Backbone et jouit d’une situation géographique absolument stratégique pour permettre le passage à l’échelle de l’hydrogène, notamment par ses projets d’interconnexion H2 avec la péninsule ibérique.
(1) - Important Project of Common European Interest (Projet important d’intérêt européen commun).
Après des études en sciences politiques à l’Université de Bonn, Jorgo Chatzimarkaki est élu député européen libéral en 2004. Lors de son mandat, il contribue à poser la première pierre du programme européen Fuel Cells and Hydrogen Joint Undertaking – désormais Clean Hydrogen Partnership. Il est nommé ambassadeur itinérant pour la Grèce en 2015 et devient Chief Executive Officer d’Hydrogen Europe en 2016.