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Inaugurée en mars 2023, la plate-forme Solidia biogaz est à ce jour la seule structure permettant de tester à l'échelle semi-industrielle des procédés innovants de méthanation et de valorisation du biogaz. Ce projet ambitieux, qui préfigure la production d'énergies de demain, est porté par Teréga, l'INSA Toulouse et la société Cler Verts, avec le soutien de la région Occitanie. Visite guidée avec Justine Morlas, cheffe du projet Solidia pour Teréga, Guilhem Caumette,Ingénieur Environnement - Recherche Energie de Teréga, et Sébastien Pommier, ingénieur recherche à l'INSA Toulouse.
Sébastien Pommier : Soucieux d'apporter une brique à la transition écologique et environnementale, nous travaillons depuis longtemps, au sein de l’INSA, sur les sujets de la méthanisation et du biogaz. Vers 2015, nous avons commencé à toucher les limites de l’expérimentation en laboratoire : il nous fallait tester nos pilotes à plus grande échelle. Notre objectif était aussi d’accompagner l’innovation dans ce domaine en fournissant à des porteurs de nouvelles technologies l'accès à des installations complexes et coûteuses qu'ils n'auraient jamais pu s'offrir seuls. En 2017, l'opportunité de créer un tel outil s'est présentée à Bélesta-en-Lauragais (31) : l'entreprise Cler Verts y construisait un méthaniseur, qui pouvait devenir la source de biogaz brut alimentant une plate-forme expérimentale. Nous avons alors parlé de ce projet un peu fou avec Teréga, et voilà comment l'aventure a commencé.
Guilhem Caumette : Pour Teréga, s'engager dans ce projet est une façon concrète de soutenir le développement des filières des gaz verts comme le biométhane ou le méthane de synthèse. Solidia permet de tester des technologies pilotes qui fonctionnent déjà en laboratoire, mais qui nécessitent une expérimentation en conditions semi-industrielles avant de devenir des démonstrateurs commercialisés. Voir fonctionner dès à présent ces solutions du futur et pouvoir analyser la qualité du gaz qu'elles produisent est également très instructif pour nous, car c'est ce gaz qui circulera demain dans nos réseaux.
Justine Morlas : L'INSA a tout d'abord noué un partenariat avec Cler Verts, qui fournit la source de biogaz brut alimentant Solidia. Ils ont également obtenu une subvention d'1,4 millions d'euros de la région Occitanie, et acheté l'instrumentation nécessaire à la plate-forme via des appels d'offres publics. Teréga a ensuite géré les études techniques et la partie génie civile du projet : terrassement, construction des bâtiments et de la halle métallique destinée à accueillir les pilotes, voirie et réseaux divers. Finalement, l'INSA a mis en place le raccordement du biogaz venant du site de Cler Verts, et amené les compresseurs et les premiers pilotes qui sont aujourd'hui testés sur la plate-forme. Ce sont également eux qui étaient chargés des raccordements EIA (Electricité Instrumentation Automatisme) et de la tuyauterie sur la plate-forme. Tout au long de ce processus, Teréga a accompagné les équipes de l'INSA pour les aider à se familiariser avec les normes de sécurité et les procédures de gestion d'une plate-forme industrielle utilisant du gaz à haute pression. Nous restons maintenant à leurs côtés pour la phase d'exploitation et la maintenance des installations.
Sébastien Pommier : Cette collaboration a été extrêmement fructueuse, notamment parce que nous venons de deux mondes vraiment différents : Teréga a une culture très industrielle, orientée sécurité et maintien des performances, et nous, nous sommes davantage des expérimentateurs, avec des habitudes de travail de laboratoire. Trouver le juste milieu et donner naissance à quelque chose de totalement nouveau pour les uns comme pour les autres est un cheminement enrichissant.
Guilhem Caumette : Nous avons dû construire un réseau d'acheminement adapté au biogaz brut de Cler Verts qui contient, outre du méthane, d'autres gaz, comme de l’H2S et du CO2 . Nous acheminons aussi de l'hydrogène sur la plate-forme. Pour tous ces gaz, il a fallu créer un dispositif complet d'analyses et de sécurité. C’est aussi un projet à une échelle inédite pour nous.
Justine Morlas : En effet, le plus inhabituel pour Teréga est de gérer de si petits volumes de gaz. Sur Solidia nous avons une arrivée de 40 Nm3 (normo mètres cubes) par heure de biogaz en provenance de Cler Verts, et nous produisons 10 Nm3 par heure d'hydrogène avec un électrolyseur. Nous avons aussi des compresseurs à 10 bar, et de petites tuyauteries. Nous avons beaucoup travaillé en interne pour adapter nos protocoles à ces spécificités de la plate-forme. Il nous a fallu totalement revoir nos habitudes.
Guilhem Caumette : La plate-forme se destine à trois axes de recherche :
- L'épuration du biogaz brut, qui est constitué à 60% de méthane mais contient aussi d'autres gaz comme le CO2 qu'il faut éliminer pour obtenir du biométhane injectable dans les réseaux.
- L'enrichissement du biogaz, aussi appelé méthanation, au cours duquel le CO2 qu'il contient est transformé en méthane grâce à l’hydrogène produit sur la plate-forme.
- Le contrôle qualité des gaz.
Deux pilotes de méthanation sont déjà à l'étude sur Solidia :
- METHAMAG, qui utilise la méthanation catalytique en faisant réagir le CO2 contenu dans le biogaz avec de l'hydrogène pour produire du méthane.
- DEMETHA, un pilote de méthanation biologique qui injecte du biogaz et de l'hydrogène dans une cuve, où des bactéries transforment l'hydrogène et le CO2 du biogaz en méthane.
Sébastien Pommier : Pour l'INSA, l'enjeu prioritaire est de satisfaire les porteurs de technologies qui ont installé ces premiers pilotes sur la plate-forme, en leur fournissant un outil qui réponde pleinement à leurs besoins. Ensuite, nous espérons que nos efforts et nos investissements pourront servir au plus grand nombre et que Solidia attirera de nombreux projets, ayant trait aussi bien à la méthanation qu'à l'épuration ou à l'analyse des gaz.